La masterclass du Grand Prix national de l'architecture

Cherchant à inscrire l’évènement dans une dynamique internationale, à renforcer la sensibilisation des étudiants aux grands enjeux de nos sociétés et à promouvoir leur interaction dans les débats contemporains, nous avons voulu organiser notre masterclass à Venise, dans le temps long de la biennale internationale d’achitecture et sur une thématique en écho avec celle-ci, telle qu’énoncée par les commissaires Yvonne Farrel et Shelley McNamara et synthètisée sous le titre Freespace: “The Biennale Architettura 2018 will be titled Freespace, word which describes a generosity of spirit and a sense of humanity at the core of architecture's agenda, focusing on the quality of space itself.” (Yvonne Farrel et Shelley McNamara).

Le territoire de L’Arsenal de Venise choisi pour le workshop se prête bien à l’expérimentation par son échelle et par son potentiel urbain, environnemental et architectural. L’Arsenal de Venise est un lieu exceptionnel de l’histoire industrielle de l’Europe où se met en place dès le XIVème siècle un processus de standardisation de la fabrication des bateaux qui permet tout à la fois une production très importante pour l’époque et une maintenance efficace de la flotte, les pièces des navires étant, au cas par cas, interchangeables.

Autre particularité remarquable du dispositif, qui a contribué à l’essor historique de la ville, est le partage des moyens, les galères étant mises à disposition des marchands en temps de paix et immédiatement mobilisables en temps de guerre.

Flexibilité des moyens et polyvalence des usages, autant de thématiques dont on mesure à nouveau la pertinence, dans un monde aux ressources limitées, et dont on soulignera l’exemplarité. Territoire clos dans la ville, parfaitement délimité géographiquement, le site de l’Arsenal pose la question, essentielle en termes d’urbanité, de la limite et de son franchissement.

A l’heure où se met en place un processus de réappropriation par les habitants de cet espace majeur, l’enceinte même de l’Arsenal focalise l’attention ; ligne de partage historique qui participe de l’identité du lieu et dont il conviendra d’imaginer les conditions de son ouverture à la ville. La réappropriation d’un lieu passe également par l’usage. Dans une ville aujourd’hui essentiellement tournée vers le tourisme, les étudiants pourront s’interroger sur l’opportunité de la réactivation du potentiel productif du site.

Venise est, enfin, une ville patrimoniale où toute intervention contemporaine a un impact qui dépasse la simple emprise du projet. Il y a là une notion de bien commun qui méritera d’être relevée et que Le Corbusier, réfléchissant sur son hôpital à Venise, résumait à sa façon : « Il faut trouver l’échelle ».

La masterclass s’inscrit ainsi sous ses différents angles dans les grands débats d’actualité concernant l’évolution de nos villes historiques confrontées à une double problématique, la mondialisation des échanges dont les conséquences sont multiples et la nécessaire préservation des ressources.

Freespace met l’accent sur les notions de liberté et de générosité qui permettent d’aborder ces transformations dans une perspective ouverte et humaniste. Toute interprétation du thème est attendue de la part des étudiants durant ces quelques jours où l’essentiel se joue dans le partage des idées et la force des propositions.

Jean Marc Ibos et Myrto Vitart, Grand Prix national de l’architecture 2016